Comment surmonter la page blanche ?
Cher Journal : en mars, j'ai douté sur mon projet comme rarement (et j'ai fait l'autruche)
Avant de commencer cette lettre, j’aimerais d’abord vous remercier chaleureusement pour l’accueil que vous avez réservé à l’annonce du titre de Nous deviendrons l'ouragan ! Lire tous vos retours a empli mon cœur de joie.
Et clairement, vu le mois de mars que je viens de passer, j’en avais bien besoin.
J’en profite pour vous poser une petite question, est-ce qu’une version audio/podcast de ces lettres vous intéresserait ?
Je vous raconte mon mois de mars ?
L’art de commencer le mois avec une lettre de refus
Des lettres de refus, j’en ai reçu des tas avec Absolu. Et je les ai toutes partagées sur mon podcast au fur et à mesure. Vous avez donc eu le loisir de m’entendre me morfondre et réfléchir à la suite de mes aventures éditoriales. Pour les curieux, voici les épisodes en question :
Je les ai plus ou moins bien prises, mais ça, je vous laisserai le découvrir à l’écoute des épisodes. Je ne les ai pas écoutés depuis un moment, mais je les considère comme une part de moi à jamais figée dans le temps. La Margot qui parle n’a aucune idée de tout ce qui va lui arriver et j’ai beaucoup de tendresse pour elle.
La pauvre, elle n’est pas au bout de ses peines ahahahah.
Bref, tout ça pour dire : il vous faut savoir une chose sur moi, je ne suis pas très fan du concept de l’échec. Autant, je ne suis pas mauvaise perdante dans un jeu, autant, échouer dans un domaine qui compte pour moi est très dur à encaisser et me fait remettre en question tout mon travail. Oui, je suis un peu une drama queen. Oui, j’étais une élève qui n’a jamais eu besoin de beaucoup travailler pour avoir de bonnes notes. Oui, j’ai toujours une dent contre miewmiewinoxkibadu72 pour son commentaire laissé sur mon skyblog.
Et j’ai reçu une lettre de refus le samedi 1er mars pour Nous deviendrons l'ouragan. Pas d’une maison d’édition cette fois, puisque le roman est déjà signé chez Big Bang, mais d’une bourse d’écriture.

J’ai monté ce dossier en novembre. Entre-temps, j’ai retravaillé plusieurs fois le plan, changer le début, le style et le caractère de certains personnages, donc, le refus concerne la version de novembre et plus celle que j’avais sous les yeux début mars. Il n’empêche que cela reste un refus et autant vous dire que je ne l’ai pas bien vécu.
Et pourtant, j’ai un contrat signé. Et pourtant, je sais que le livre va sortir. Et pourtant, j’en parle autour de moi et le pitch plaît. Mais recevoir un refus me fait toujours aussi mal, comme quoi être publié ne règle pas du tout les problèmes de confiance en soi.
Pendant plusieurs jours, j’ai donc évité l’écriture parce que je suis la reine de la procrastination active et que j’avais besoin de repos. Moi qui avais si bien démarré le premier jet, je me retrouvais donc à bloquer à la fin de la première partie. Rien ne voulait plus sortir. Rien de bon en tout cas. J’en suis donc venue à la conclusion que je devais passer en jet 0.
J’ai réussi à finir la partie 1 dans la douleur (même si j’ai trouvé les deux derniers chapitres assez bons) et j’ai entamé la seconde partie de mars en pensant que mon blocage avait été uniquement dû à ce refus. Je n’allais quand même pas bloquer sur ça durant des mois ! Hors de question. Même si mon dossier n’a pas convaincu, j’aime ce livre et je compte l’emmener jusqu’au bout, tout comme j’ai porté Absolu quand personne n’y croyait. En plus, je l’ai déjà bien retravaillé depuis la version de novembre. Alors, non, je ne compte pas abandonner.
J’ai donc retroussé mes manches et me suis mise au travail.
Enfin, presque… Oupsi ?
Petit problème : mon blocage n’avait pas rien à avoir avec le refus. Enfin, pas seulement.
Je suis une superbe autruche
Vous savez ce que j’ai fait en mars ? Beaucoup de déplacement. C’était mon mois le plus chargé cette année avec deux rencontres en librairie, une intervention scolaire et trois salons (heureusement, un couac m’a permis d’en annuler un). Bref, j’ai bougé dans tous les sens ce qui ne m’a pas vraiment aidé à me reposer ni à prendre du recul sur mon blocage.
Je me suis donc forcée à écrire en me disant que ce n’était pas grave si je n’aimais pas ce que je faisais. Je trouve le début de ma deuxième partie nulle ? Aucun souciiiiii. C’est parce que c’est du premier jet voyons ! Absolument pas parce que je fais l’autruche sur le véritable problème. Non, non, je bloquais à cause de mon refus de bourse, rien d’autre, je vous assure. Quoi ? Autre chose ? Absolument pas ahah. Quelle idée, voyons.

Vous savez ce qui est formidable avec les déplacements en salon ? C’est qu’on passe le week-end avec les copains et les copines auteurices. Des repas complets à pouvoir parler d’écriture avec d’autres personnes passionnées qui ont des visions et des approches différentes. C’est tellement stimulant !
Et donc, la jolie autruche que je suis a parlé autour d’elle de ses problèmes d’écriture. J’ai notamment évoqué la longueur du texte qui commençait à me filer des sueurs froides. 220 000 mots d’objectif, je vous rappelle. 1 500 000 signes si vous préférez.
C’est ainsi que Manon Fargetton m’a demandé :
— Et pourquoi tu ne le diviserais pas en deux tomes ?
Une duologie donc. J’y ai pensé. Après tout, c'est une question juste. L'histoire, telle qu'elle est prévue, est véritablement énorme et il y aurait de quoi écrire deux romans. Pour vous donner des références, les trois tomes d’Absolu font respectivement 132 000, 137 000 et 165 000 mots. Cependant, j'ai froncé les sourcils.
— Non. Ça n'aurait pas de sens. Le premier tome serait trop ennuyeux et le second trop rapide.
La réponse est sortie toute seule. Ce n’est pas quelque chose auquel j’avais sérieusement réfléchi et pourtant, ma langue a parlé plus vite que moi. Ça a fait sourire Manon, comme si elle savait que j'allais dire ça.
— Alors, c'est que tu as peut-être un problème dans ta structure. Ce n'est pas logique.
Aïe. Aïe. Aïe. Manon, sans le savoir, venait de tirer sur mon cou d’autruche pour le sortir du sable. Et ce que je voyais après avoir chassé les grains de mes yeux ne me plaisait pas du tout.
Bien sûr qu’elle avait raison.

On était déjà arrivé à la fin du mois de mars que j’avais l’impression d’avoir gâché. 25 000 de premier jet écrit, tout ça peut-être pour rien ? Je me posais des tas de questions.
Est-ce que Nous deviendrons l'ouragan ne devrait pas être une duologie ? Est-ce que ça aurait du sens en terme de rythme ? Est-ce que ça me permettrait de l’aborder plus sereinement ?
Est-ce que je suis réellement en phase de blocage ou est-ce que je procrastine, car le roman me fait peur ? Est-ce que je revis le tome 2 d’Absolu (aka, celui que j’ai dû redémarrer trois fois, car il était dur à structurer) ou le tome 3 d’Absolu (aka celui où j’ai procrastiné cinq mois ?)
Et si ce n’est ni le refus ni la structure qui posent problème, alors, qu’est-ce que c’est ?
Il m’aura fallu un mois entier pour le comprendre.
Un mois à me dire que si je bloquais sur certains chapitres, c'était à cause du contre-coût du refus de la bourse ou de la fatigue de tous mes déplacements. Un mois à rejeter la faute vers des éléments extérieurs que je ne pouvais contrôler, pour ne pas à avoir à remettre en question mon propre travail.
À savoir :
Ce roman est trop gros. Certains chapitres peuvent d’ores et déjà être réunis pour gagner en efficacité.
Je connais très mal mes personnages à part T.
C'est surtout ce deuxième point qui m'a porté préjudice. J'avais tellement T en tête que je ne me suis absolument pas rendu compte que j'avais négligé tous les autres (ce qui, forcément, me fait totalement bloquer au moment où je dois écrire de leur point de vue.)
Le premier avril, j’ai donc entièrement restructuré mon roman en conséquence. Passant de 92 chapitres à 62, avec une coupe faite ainsi :
Partie 1 : de 9 à 8 chapitres
Partie 2 : de 36 à 17 chapitres (
vous savez, la partie ennuyeuse ? Je l’ai découpée en petits morceaux ahahahahah)Partie 3 : de 20 à 17 chapitres
Partie 4 : de 26 à 21 chapitres
Vous vous demandez donc sûrement :
Mais Margot, tu as fait comment pour retirer AUTANT de chapitres ? Tu as dû enlever plein d’intrigues !
Eh bien, non. J’ai juste découvert pourquoi cette structure ne tenait pas la route : j’avais envisagé le découpage comme Absolu, à savoir un narrateur par chapitre. Sauf que Nous deviendrons l'ouragan est à la troisième personne et que ce n’est absolument pas nécessaire de me forcer à rallonger des scènes pour rien. À partir de ce constat, j’ai parfois pu réunir quatre chapitres en un et c’est ainsi que j’en ai “éliminé” trente sans pour autant enlever aucun événement du roman.
Bref, Mars, tu m’en auras fait voir de toutes les couleurs. Ce que je retiens de toi ? Je dois faire moins de déplacement pour préserver mon énergie, savoir remettre en question mon travail quand je bloque, ne pas hésiter à demander conseil et ne pas compter sur une validation extérieure pour mener à bien les projets qui me tiennent à cœur.
Rien de bien nouveau sous le soleil, mais je suis parfois une élève longue à la détente.
Je démarre donc avril avec l’esprit plus léger et l’ambition de bel et bien finir ce premier jet pour le 30 juin (2500 mots par jour, 5 jours sur 7, pendant trois mois, c’est faisable, non ?). J’ai pris le temps de découvrir mes autres personnages et de leur accorder de la place tout en dynamisant l’intrigue. Il n’y a plus qu’à laisser mes doigts taper sur le clavier, en étant à l’écoute de mon instinct et de mes pairs. Et vous savez quoi ? Pour le moment, j’éprouve plus de plaisir à écrire depuis une semaine qu’en un mois entier, ce qui me semble très prometteur.
J’espère pouvoir vous dire à la lettre de mai que les 50 000 premiers mots, et donc le premier tiers du roman, ont été posés.
D’ici là, souhaitez-moi bon courage, car je vais en avoir besoin.
Bises.
Mes dédicaces d’avril : on se rencontre ?
12 avril, 16h-19h : dédicaces à la Librairie de Paris à Saint-Etienne
19 et 20 avril : dédicaces au salon Trolls et Légendes à Mons (Belgique)
25, 26 et 27 avril : dédicaces et table ronde au Forum du Livre de Saint-Louis d’Alsace
Tu as envie de me soutenir dans la création de mes romans (garantie found family et traumas) ? Ne buvant pas de café, mon inspiration carbure au matcha. J’en bois une fois par jour, deux quand j’écris un chapitre particulièrement traumatisant.
Donc, si tu veux financer tes futures larmes et mon addiction au matcha, j’en serais plus que reconnaissante. Mes personnages, eux, ne te remercieront pas par contre.
💙💙💙
Je crois que c'est ma lettre préférée jusqu'ici ❤️
Et je crois aussi que la Margot du mois de mars mérite autant de tendresse que celle qui collectionnait les refus pour Absolu ❤️